Antoine Larousso
L A M A I S O N D U
B I E N - Ê T R E
Une question d'état d'esprit...
L’image du canard : calme en surface mais frénétique sous l’eau, pour avancer
mais aussi pour s’équilibrer. Qui oserait penser que le brave coin coin ne se
sente pas bien dans ses plumes ? Il est dans la nature de l’homme d’agir et de
penser et c’est généralement dans l’action qu’il se sentira le mieux. « Tu peux
rester immobile dans le courant d’une rivière mais pas dans le monde des hommes
» rappelle un proverbe japonais. Quant aux pensées, ce n’est évidemment pas leur
quantité mais leur qualité qui prime : si je pense à l’amour ou à un projet
enthousiasmant, le bien-être flottera sur mes pensées ; si par contre je doute,
rumine ou fulmine, le bien-être sobrera corps et âme… Un esprit serein ne
devrait donc pas être confondu avec un esprit absent ou inerte : l’ataraxie, ce
n’est pas l’apathie ! De même, le wu-wei ou "non-agir" taoïste ne saurait se
traduire par « passivité » mais plutôt par lâcher-prise, laisser faire ou agir
sans intervenir. Enfin, la méditation ne vise pas tant à se vider l’esprit qu’à
prendre conscience de ses pensées et de la nature des choses. Méditer, ce n’est
pas se couper du monde ! Le cycle de la vie exige des périodes de mal-être. Les
nier ou se focaliser dessus ne ferait que les renforcer. Puisque nous ne pouvons
rien y changer, autant prendre la vie telle qu’elle vient ! Voilà ce que
j’appellerais sérénité : non pas une absence permanente de trouble ou
d’agitation mais plutôt une capacité à prendre du recul par rapport à ses
problèmes ; une aptitude à reconnaître et maîtriser ses émotions. La sérénité
n’est ainsi pas tant un état qu’une qualité : une stratégie pour la gestion des
problèmes, une dynamique à cultiver pour les moments difficiles. Trois
stratégies complémentaires nous y aideront : prendre conscience de nos pensées
négatives, enrichir notre esprit de pensées positives et s’investir dans une
activité.
Extraits de l'Autre Choix
de Benoît Saint Girons
Vers une prise de conscience…
Notre cerveau n’est pas sélectif : il accueille aussi bien les pensées positives
que négatives. Toutes ces pensées sont stockées dans le subconscient, cette
fameuse boite noire de notre vie passée. Si personne n’est capable de la
déchiffrer, il est possible d’avoir une idée de sa couleur (plutôt noire ou
plutôt rose) ou de sa moyenne. Il suffit d’observer notre réaction aux
événements. Chaque événement passe en effet dans le bain du subconscient et en
ressortira imprégné de la couleur du bain : si un événement blanc trempe dans du
noir, il en ressortira gris ! Une personne qui critique tout et trouve tout nul
est soit en pleine crise d’adolescence, soit influencée par un subconscient à
dominance négative.
Un événement s’imprimera dans nos subconscients à proportion de l’importance que
nous lui accordons. Ce n’est pas tant l’événement négatif qui laisse une trace
que notre perception de cet événement et notre réaction sentimentale face à cet
événement. Il est donc malheureux que notre société s’intéresse autant aux
victimes et aux histoires tristes : car si au lieu du « Pauvre de vous ! Je vous
écoute… » nous nous mettions plutôt à dire « Courage, ça ira mieux bientôt ! »
ou « Que comptez-vous faire ? », il est bien évident que les sujets ne
resteraient pas victimes aussi longtemps…
Cela ne signifie évidemment pas que nous devions prendre sur nous l’entière
responsabilité de tout ce qui nous arrive: si des problèmes existent, c’est
d’abord à la cause de ces problèmes qu’il convient de s’atteler. Mais si ce qui
est fait n’est plus à faire, ce qui est survenu n’a pas nécessairement besoin
d’être étendu : nous pouvons passer à autre chose, rechercher le côté positif de
l’événement ou simplement observer notre état d’esprit sans y porter de jugement
de valeur.
Tiens, voilà du dukkha…
Prendre conscience rapidement de son état mental négatif est un facteur
déterminant dans la gestion de ses émotions : « Tiens, je suis en colère… », «
Allons bon, me voilà soucieux… » Cette étape permet aussitôt de prendre de la
hauteur ou de la distance face à ses sentiments et de quitter le mode réaction
pour le mode action. Je pense, donc je suis… capable de penser différemment !
Le risque avec les sentiments négatifs est en effet qu’ils nous échappent,
grandissent et se reproduisent. Idéalement, une pensée négative devrait
survenir, faire son petit show et repartir bien vite devant l’indifférence
rencontrée. Certaines personnes malheureusement prennent goût au spectacle et
applaudissent tant et si bien que le mal-être prend la grosse tête et en remet
une couche. Nous connaissons tous des personnes qui se vautrent ainsi dans la
misère, les complaintes et les critiques. Evidemment, il ne s’agit pas d’un
désir conscient et ces personnes jureront avoir sifflé. En réalité, elles sont
bien sûr responsables de la plupart de leurs troubles [...]
Suite à ma retraite de méditation en Thaïlande, j’ai pour ma part développé une
autre recette. Je la développais dans mon premier livre l'Alchimie du Succès : à
chaque fois que je me trouve face à une situation déplaisante, je me dis
mentalement « Tiens, voila du Dukkha... » Cette petite phrase enclenche aussitôt
chez moi la phase active. Je sais alors que c’est gagné et que je vais préserver
ma sérénité.
Dukkha (ou doukha) est un terme pâli la langue ancienne de l’Inde proche du
sanskrit et toujours parlée par les bouddhistes du Sud. Ce terme englobe tout ce
qui ne nous satisfait pas, tout ce qui a pour nous un caractère négatif :
tristesse, stress, doute, incertitude, problèmes, malheurs, maladie, souffrance,
chagrin, mort, lassitude, irritations de toutes sortes,... Autant dire que l’on
rencontre souvent le Dukkha, d’où l'intérêt d’en prendre conscience.
Encore une fois, précisons bien qu’il ne saurait être question de tout contrôler
et de devenir un maniaque de la propreté mentale. Toute réaction, quelle qu’elle
soit, devrait en fait être considérée avec bienveillance : il s’agit d’un
message naturel de mon esprit. Le message est positif ? Profitez-en! Il ne
devrait y avoir ni mesure (et à fortiori demi-mesure), ni monotonie dans le
bien-être. Le message est négatif ? Ainsi soit-il ! Vous avez tout à fait le
droit de vous sentir mal de temps en temps. Rien ne vous oblige toutefois à être
masochiste et prendre conscience de votre état vous procurera généralement une
plus grande satisfaction...
Aux commandes d’un esprit optimiste…
Une fois aux commandes, plusieurs questions peuvent aider à devenir plus actif
face à l’événement. Tout d’abord, « Est-ce que cela vaut le coup ? »:
l’événement est-il suffisamment important pour mériter mon attention et mes
sentiments ? J’ai certes le droit de pleurer et de me mettre en colère mais ne
conviendrait-il pas de réserver ces expressions aux événements de valeur et ne
pas faire une montagne d’une colline ?
Ensuite, « Ce sentiment X ou Y que j’éprouve va-t-il améliorer en quoi que ce
soit la situation ? » Sans tomber dans un concept utilitariste des sentiments,
il est rarement positif d’aggraver volontairement les choses. Enfin, « Est-ce
que je peux faire quelque chose maintenant vis-à-vis de ce problème ? » Si oui,
alors faites le ! Sinon, à quoi bon y penser puisque cela est inutile ?
« Dans la vie, faut pas s’en faire » chantait Maurice Chevalier. Il ne s’agit
pas là d’une obligation mais d’une recommandation : je peux m’en faire – et je
m’en ferai nécessairement de temps en temps – mais ce n’est pas conseillé pour
mon bien-être. La nervosité face à la vie ou le pessimisme vis-à-vis de ce qui
m’attend sont en effet deux sentiments parmi les plus dévastateurs qui soient.
Car si le futur comprendra naturellement des périodes difficiles, à quoi bon les
imaginer d’avance et les laisser troubler le présent ? Réagir négativement face
aux situations négatives peut encore se comprendre mais quelle folie que
d’augurer par avance des événements et de faire le choix du négatif !
Auriez-vous par hasard des dons de voyance, ou alors commis un crime ? [...]
Quelques soient nos accomplissements passés ou notre situation présente, le
futur restera toujours ouvert vis-à-vis de nos interprétations des événements.
Je peux fantasmer sur des catastrophes et faire grimper ma tension artérielle
mais la vérité est que, dans le feu de l’action, je réagirai probablement
différemment, simplement parce que la situation sera différente. « La faculté
qu’a l’homme de se creuser un trou, de sécréter une coquille, de dresser autour
de soi une fragile barrière de défense, même dans des circonstances apparemment
désespérées, est un phénomène stupéfiant qui demanderait à être étudié de près »
écrit par exemple Primo Levi à propos de son expérience des camps de
concentration nazis. Boris Cyrulnik, dans ses ouvrages, met aussi en lumière de
très nombreux cas de résilience : si des victimes du nazisme et des enfants
battus ou abandonnés ont réussi à se reconstruire et, finalement, à apprécier la
vie, c’est qu’il n’y a pas à désespérer !
Votre route est trop caillouteuse ? Il ne sert à rien de vous plaindre ou de
regretter de ne pas avoir pris l’autre chemin à l’intersection : comme, sur le
chemin de la vie, il est impossible de retourner en arrière, mieux vaut se
préoccuper du meilleur moyen d’aller de l’avant ! Cela est facilité par une
faculté formidable que nous possédons tous naturellement : la possibilité, à
tous moments et en tout lieux, de créer de nouvelles intersections.
Ces intersections s’appellent tout simplement le désir de changement. A tout
moment, nous pouvons nous asseoir et faire le point sur notre cheminement : ce
qui va, ce qui ne va pas, ce que nous souhaiterions changer, ce que nous
aimerions vivre,… Inutile de nous apitoyer sur notre situation présente: elle
est ce qu’elle est et, qui plus est, elle est logique puisque définie par nos
actions et réactions antérieures.
Pas question toutefois de tout placer dans le futur : « Ce qui est passé a fui;
ce que tu espères est absent; mais le présent est à toi » rappelle un proverbe
arabe. Nous n’avons que le présent à supporter disaient aussi les stoïciens ; un
présent qui, à chaque seconde, dépasse les événements du passé. L’exercice
consiste donc plutôt à choisir une route plus belle ou moins abrupte (jamais
moins longue !) ou alors de décider de mieux s’équiper.
Arrêtez-vous dans un lieu calme et confortable et donnez-vous le temps de
l’introspection. Faîtes le point régulièrement sur votre situation afin de vous
assurer que vous vivez bien ce que vous désirez vivre. Si un sentiment de
malaise domine, recherchez vos rêves et retravaillez vos ambitions. Il est
difficile d’être serein lorsque sa vie ne correspond pas à ses aspirations. Il
est ridicule de ne pas être serein lorsque l’orientation de sa vie relève d’un
choix conscient : il peut pleuvoir, grêler ou faire tempête, la flèche suit son
cours dans la direction que je lui ai donnée.
Toucher ou rater sa cible n’a pas d’importance, comme nous l’enseigne l’art
japonais du Kyudo: l’archer a fait de son mieux et il ne lui incombe que
d’apprécier le temps présent. « Il ne s'agit pas de viser une cible extérieure,
mais l'archer et la cible sont unis, on intègre la cible à soi-même. Il faut
oublier l'arc qui tire, oublier soi-même, ne faire qu'un avec l'arc et la cible,
tendre vers l'infini sans en connaître le point d'aboutissement... » disait
Anzawa Sensei, le grand maître japonais. « La véritable cible que l’archer doit
viser est son propre cœur » dit une autre maxime de cet art…
Enrichir son esprit de pensées positives…
L’accumulation de richesse n’est bénéfique qu’à un endroit : notre esprit.
S’enrichir intellectuellement au quotidien est source de bien-être : « je suis
meilleur ce soir que je ne l’étais ce matin ! » Cet enrichissement peut
correspondre à une remise en cause de préjugés ou à l’acquisition de nouvelles
connaissances mais le plus bénéfique est encore d’abreuver son esprit d’images,
de couleurs et de pensées positives. Ce n’est pas parce que les idées sont
gratuites qu’il s’agit de penser n’importe quoi ! [...]
Face à un sentiment négatif, nous aurions donc tout intérêt à faire naître en
nous des formules positives contraires. Lorsque je prends conscience de ma
colère, je peux par exemple utiliser la réflexion suivante : « OK, je suis en
colère mais cela ne durera pas. Je viens de trouver un autre moyen de ne pas
être serein mais, chaque jour, je développe un peu plus ma compréhension de la
sérénité. J’avance progressivement, à mon rythme, sur le chemin de la sagesse »
Nous avons vu que l’inconscient accueillait indifféremment les sentiments
négatifs et les sentiments positifs. Lorsque je contredis un message négatif par
une formulation positive ou, mieux encore, par une action positive, c’est ce
dernier message qui laissera une trace. Petit à petit, au fur et à mesure des
répétitions, un nouveau subconscient se mettra en place. Une vie plus riche et
positive en découlera.
Imaginez que votre subconscient soit une baignoire remplie d’eau. Dans le passé,
vous y avez placé plusieurs types de colorants : certains étaient lumineux mais
d’autres noirs. Progressivement, votre bain a ainsi pris une coloration assez
sombre qui influence négativement votre interprétation de la vie. Vous ne pouvez
pas changer l’eau et vous ne pouvez pas enlever le colorant négatif. La
psychanalyse s’intéresse aux colorants les plus noirs et scrute l’eau à la loupe
à la recherche de traces oubliées (quitte au besoin à en inventer). Les drogues
et autres psychotropes illuminent artificiellement le bain. Pour ma part, je
préfère rajouter de l’eau (l’action) ou des colorants plus gais (les pensées
positives).
Objectivité, choix et objectifs…
Pourquoi, pour commencer, ne pas regarder la vie de manière objective ? Au cours
d’une journée type, qu’est-ce qui va et qu’est-ce qui ne va pas ? Faire le
compte nous permettra généralement de réaliser que la majorité de ce qui nous
arrive est bel et bien positif. Préférer se focaliser sur les éléments négatifs
est un choix. Combien de personnes rentrent chez elles et déclarent : « Chérie,
j’ai eu une journée formidable : la voiture a bien démarré, j’ai fini par
trouver une place de parking, je suis arrivé presque à l’heure au bureau, la
standardiste m’a dit bonjour ainsi que tous mes collègues, j’ai fait mon travail
correctement, j’ai mangé à ma faim au restaurant d’entreprise, mon patron m’a
convoqué pour m’encourager à être plus minutieux, j’ai fait des courses dans un
magasin plein de victuailles, j’ai pu y acheter ce que je souhaitais et
maintenant je rentre dans ma maison et j’embrasse la femme que j’aime et qui
m’aime. » Changez de point de vue et vous changerez !
Lorsque je loue un DVD, j’ai également le choix : je peux prendre un film de
guerre ou bien une comédie musicale, un film d’horreur ou un dessin animé. Il
est facile de voir si un film est positif : nous le ressentons ! Un beau film
nous soulève de l’intérieur ! Même chose pour la musique ou les livres : au-delà
du talent de l’artiste, la sagesse sera toujours plus constructive que la haine…
Avoir défini ses objectifs et savoir où nous nous trouvons sur le chemin de la
vie permettra aussi de développer un sentiment de paix intérieure. J’ai
conscience d’être au bon endroit au bon moment, à faire ce qui convient d’être
fait. Multiplier ses expériences, varier ses plaisirs, vivre de nouvelles
sensations, côtoyer l’inconnu, aller à la rencontre d’autre chose, essayer par
soi-même, être bricoleur… seront autant de sources de contentement.
Evidemment, il ne s’agit pas de collectionner avec un esprit de comptable: la
vie n’est pas une addition ! Il ne s’agit pas non plus de vouloir tout faire :
ce ne serait pas réaliste et donc source de frustration. Mais si je me penche
sur ma vie et que j’y trouve une vie riche en expériences et en réalisations, je
pourrai légitimement être satisfait. Si au contraire j’y observe une vie pleine
d’habitudes et de préjugés, je développerai alors sans doute un sentiment de
gâchis ou de regret. C’est cela aussi le bien-être : être bien dans sa vie au
moment où je fais le point !
La Maison du Bien-Être
Centre Oasis, 9 rue du Vélodrome 1205 Genève, Suisse
Tél: + 41 (0)22 320 8886 antoine[at]maisondubienetre.com
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